Collectif du Carcassonnais pour
une Gestion Publique de l'eau

 
 
 
Pour le Collectif,  les intérêts d'actionnaires privés sont incompatibles avec les intérêts de l'usager, du citoyen. L'exemple de la privatisation des laboratoires d'analyses d'eau est une illustration édifiante de cette incompatibilité.
 
Rappelez-vous, dans l'Aude le laboratoire départemental des eaux était public, il dépendait du Centre Hospitalier de Carcassonne. Un article de la loi sur l'eau, adopté après un lobbying intense, a obligé les DDASS à lancer un appel à la concurrence. De gros laboratoires privés aux dents longues ont emporté les marchés en cassant les prix et en faisant fortement pression sur les services décideurs qui auraient pu être tentés de privilégier proximité, qualité et confiance. Adieu donc le labo des eaux départemental public de l'hôpital à l'été 2009, entrée de la logique privée.
 
Premier effet, le laboratoire des eaux de l'hôpital a fermé, malgré son personnel qualifié, malgré des équipements neufs, et malgré une accréditation fraichement acquise auprès du COFRAC. Un bon exemple de dilapidation d'argent public au nom de la "concurrence libre et non faussée".
 
Résultat : un article de février 2013 du journal Libération raconte comment l'Agence Régionale de Santé (ARS) du Languedoc-Roussillon a alerté dès 2011 sur des procédures non respectées par le laboratoire Eurofins, société qui a racheté les laboratoires d'expertise Pasteur de Lille qui avaient emporté le marché dans l'Aude?
Les « dysfonctionnements » relevés : « certains prélèvements qui ne sont pas mis en analyse dans les temps impartis, ce qui peut biaiser les résultats ». Inquiétant quand il s'agit d'eau potable, et que l'eau envoyée en Meurthe- et-Moselle met plusieurs jours avant d'être analysée !  L'ARS le dit, après contrôle inopiné sur deux sites du laboratoire, dont celui de Montpellier : « Ces dysfonctionnements peuvent donner lieu à des résultats erronés ou des non-conformités signalées tardivement à l'ARS ».  D'autres contrôles sur le laboratoire sont actuellement en cours par l'organisme chargé des accréditations. Mais quel choix ont les agences de santé pour les prochains appels d'offres ? La politique des prix cassés a fait fermer de multiples labos, et laisse en lice deux gros laboratoires, situation pire encore que celle des géants de l'eau, avec trois sociétés en « concurrence ».
 
Pour le Collectif, il faut savoir tirer des leçons de ce genre d'exemple. Prendre les marchés en cassant les prix, cela passe par une concentration dans si peu de sociétés qu'il n'y a plus véritablement de concurrence. Quant aux prix temporairement cassés, ils ont... un prix, payé par l'usager par une qualité moindre, voire des risques sanitaires. Et comment revenir en arrière, quand les compétences locales sont éliminées, qu'il s'agisse du laboratoire des eaux départemental ou des employés travaillant sur l'eau des régies des villages ?
 
 
En complément :

Un lien avec un article édifiant de Politis
http://www.politis.fr/Eau-potable-une-nouvelle-preuve-du,22479.html

Le contenu d'un amendement de sénateurs en date du 5 septembre 2006 qui visait à annuler l'article 52 du projet  de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, instaurant la mise en concurrence des laboratoires d'analyse d'eau :
"Cet article introduit une mise en concurrence des laboratoires départementaux et municipaux d'analyses avec des laboratoires privés en matière de contrôle sanitaire des eaux destinées à l'alimentation humaine. Il confie à l'Etat le soin d'organiser cette mise en concurrence.
Outre le fait que cette disposition semble complexifier le régime de surveillance de la qualité de l'eau entre les collectivités locales et l'Etat, elle présente un danger majeur quant à la protection sanitaire des populations.
En effet, les analyses effectuées par les laboratoires constituent un des éléments clés des contrôles sanitaires de l'eau. Elles doivent donc, par leur nature même, être assurées par un réseau national de laboratoires indépendants, à travers un maillage couvrant l'intégrité du territoire, comme c'est le cas actuellement des laboratoires départementaux et municipaux d'analyses. Plus généralement, la surveillance et le contrôle de la qualité de l'eau destinée à la consommation humaine constituent un enjeu fondamental en terme de santé et de sécurité publiques.
Ce constat avait déjà conduit la loi sur le développement des territoires ruraux à exclure la mise en concurrence des laboratoires départementaux d'analyses pour les analyses nécessaires au contrôle des risques sanitaires en matière d'alimentation humaine.
Le régime actuel, tel qu'il figure dans le code de la santé publique doit, en conséquence, être maintenu."

Des extraits de l'article de Libération cité plus haut :
(au sujet d'Eurofins, qui fait publicité de ses analyses ADN)
"Car si les tests ADN semblent fiables, les tests menés sur l'eau du robinet des Français - autre activité de l'entreprise - le sont un peu moins. Selon nos informations, le réseau hydrologie du groupe s'est ainsi vu, en 2012, sévèrement remonter les bretelles par la puissance publique, qui a relevé des «dysfonctionnements» dans ses méthodes et ses analyses. Aucun scandale sanitaire - a priori - à déplorer, mais le symptôme criant d'un secteur sujet aux mêmes maux que d'autres industries : la qualité sacrifiée sur l'autel de la rentabilité.
Depuis son captage jusqu'au robinet des usagers, l'eau potable subit un double contrôle, interne et externe. Les contrôles sanitaires dits externes sont réalisés par des labos indépendants qui remportent des appels d'offres. Grâce à son gigantesque portefeuille d'analyses, Eurofins contrôle la qualité des eaux destinées à la consommation humaine pour le compte de nombreuses agences régionales de santé (ARS). Pour se déployer sur l'ensemble du territoire, le groupe a même racheté, en 2011, l'ensemble des labos d?expertise appartenant à l'Institut Pasteur de Lille, ce qui le rend incontournable. Rien qu'en Ile-de-France, Eurofins contrôle la qualité des eaux de six des huit départements de la région.
Fiabilité. Mais, en 2011, la puissance du labo vacille : l'agence régionale de santé du Languedoc-Roussillon constate plusieurs dysfonctionnements chez Eurofins, retenu en 2009 pour réaliser les contrôles dans les départements de l'Aude, de l'Hérault et du Gard. Principal grief : certains prélèvements ne sont pas mis en analyse dans les temps impartis (de quelques heures à sept jours, selon les analyses), ce qui peut biaiser les résultats. La faute à la restructuration menée par le groupe, qui se réorganise en «pôles de compétence». Au site des Ulis, en Essonne, les analyses sur la radioactivité, à celui de Maxéville, situé dans l'est de la France, en Meurthe-et-Moselle, celles de chimie organique.
Ainsi, un échantillon d'eau prélevé à Montpellier est transporté en navette - parfois non réfrigérée - et mis en analyse à son arrivée, plusieurs jours plus tard, à 700 km de là. Dans ce laps de temps, certains micropolluants peuvent se volatiliser et modifier les résultats. Des défaillances qui mettent en doute la fiabilité technique des analyses d?Eurofins. «On ne peut pas dire avec certitude que les résultats étaient mauvais», explique un technicien de l'Agence nationale de sécurité sanitaire et de l'environnement (Anses) qui a travaillé sur le dossier. Ni qu'ils étaient corrects. Car, sur certains prélèvements, le respect du délai est capital. «S'il y a une pollution dans l'eau potable et que l'analyse n'est pas faite en temps et en heure, ça peut engendrer un grave problème de santé publique, par exemple une épidémie de gastro, des maux de tête», note un salarié.
Face à ces retards, l'ARS de Montpellier alerte la Direction générale de la santé (DGS), à Paris, laquelle saisit le laboratoire d'hydrologie de Nancy de l?Anses. Des visites sont organisées, dont l'une au débotté, en août et septembre, sur les sites de Montpellier et de Maxéville. Le rapport est sans appel : «Ces dysfonctionnements peuvent donner lieu à des résultats erronés ou des non-conformités signalées tardivement à l'ARS». Eurofins le reconnaît dans un courrier à la DGS. Sa réorganisation s'est traduite par un «afflux d'échantillons sur Maxéville», qui a créé «des retards majeurs, dont plusieurs ARS ont eu à pâtir». Parallèlement, la DGS sollicite l'intervention du Cofrac, l'organisme chargé de l'accréditation en France, pour évaluer les «capacités de ce laboratoire à poursuivre ses activités, notamment pour l'analyse des micropolluants organiques». Les résultats seront connus à la mi-mars."



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